Fashion victime / Juno Dawson ; traduit de l'anglais par Benjamin Kuntzer.

"#metoo dans le monde de la mode"--Couverture.

Dotée d'une silhouette androgyne et dénuée de courbes, Jana Novak, seize ans, subit depuis des années les railleries de ses camarades, qui l'affublent de sobriquets tous plus dégradants les uns que les autres. Aussi est-elle totalement éberluée lorsqu'elle est approchée par un chasseur de talents de Prestige Models, l'agence de mannequins londonienne la plus renommée. Bien que n'ayant jamais aspiré à évoluer dans cette sphère, elle qui s'est toujours considérée comme dénuée de beauté, Jana décide de tenter l'aventure le temps d'amasser des fonds pour financer ses études. La voilà propulsée dans un monde dont elle ne connaît pas les règles, où on loue d'abord sa beauté en lui faisant miroiter une vie idyllique. Seulement, la réalité s'avère beaucoup moins rose! Pendant la Fashion Week, qui la propulse de New York à Milan en passant par Pékin, Séoul, Paris et Dubaï, elle découvre l'énorme prix à payer pour défiler sur les podiums et admirer son visage photoshoppé placardé dans les villes. [SDM]

Un roman captivant, troublant et percutant, qui dresse un portrait très sombre d'une industrie de la mode où de jeunes adolescentes d'à peine quatorze, quinze et seize ans, naturellement maigres, sont recrutées à la foire ou au centre commercial par des agences de mannequins sans scrupules, qui leur offrent un cadeau empoisonné. Rien de glamour dans les coulisses de ce monde superficiel et cruel où l'héroïne de seize ans, terriblement attachante et criante de vérité, effectue une véritable descente aux enfers au cours de laquelle le lecteur souffre avec elle. Anxyiolitiques, somnifères et, dans de nombreux cas, cigarettes et cocaïne deviennent nécessaires aux adolescentes livrées à elles-mêmes afin de supporter la pression, le stress et la fatigue qui les accablent alors qu'on les contraint à un horaire inhumain, à des castings se déroulant dans des conditions exécrables, à des appartements miteux et exigus partagés avec leurs pairs, à un travail avec des photographes n'ayant aucune diplomatie, bref, à un métier qu'elles exercent l'estomac vide (ce dernier les conduisant parfois au bord de l'évanouissement) et dans le cadre duquel elles sont considérées comme de simples morceaux de viande par d'ignobles individus, qui se permettent toutes les réflexions possibles sur leur corps et qui les regardent de travers si elles osent avaler autre chose qu'une pomme, un minuscule morceau de poisson cuit à la vapeur ou un bout de salade. Alors qu'elle s'éloigne de ses véritables amis et de son amoureux, Jana réalise que le mannequinat lui rapporte énormément d'argent, mais qu'elle n'a pas un instant pour le dépenser et que le bien-être qu'elle ressent pendant les minuscules cinq minutes où elle défile devant un public qui l'adule ne pourra jamais compenser pour tous les désagréments et, surtout, les abus sexuels, banalisés par les propriétaires des agences, dont sont victimes les jeunes mannequins par des créateurs et photographes que le milieu protège. Dans la seconde partie du roman, c'est une Jana bien décidée à faire changer les mentalités qui se reprend en main et qui se bat avec une soif de vivre et une énergie admirables afin de faire tomber celui qui l'a agressée pendant une séance photo extrêmement troublante survenue dans un hôtel. L'espoir et la lumière surviennent enfin lors de la chute, loin d'être idéalisée, de ce roman coup de poing, qui s'inscrit dans la ligne du mouvement #Metoo et des vagues de dénonciations qui se succèdent de manière essentielle depuis quelques années. À compter de 15 ans. [SDM]

À partir de 15 ans.

J++ 4.