Le carnet de Grauku / Sophie Laroche ; préface de Michèle Barbara Pelletier.

Réédition. Depuis l'âge de douze ans, Manon est tiraillée entre son envie de maigrir et celle de manger. Son péché? Le chocolat, source de réconfort qui chasse momentanément toutes ses peines. Or, le jour où des compagnes de classe mesquines profitent du cours de piscine pour prendre une photo de son "gros cul" et la faire circuler dans tout le lycée, l'adolescente voit ses complexes décuplés et décide de créer son blog. Le blog de "Grauku", ce double pernicieux qui la pousse à manger tout en lui renvoyant au visage la graisse qui ne manque pas de s'accumuler sur ses hanches. Une internaute lui propose anonymement de l'aider à oublier jusqu'à l'existence du chocolat. Manon bannit progressivement de son régime les friandises et les pâtisseries, perdant avec ravissement quelques kilos. Or, elle constate bientôt qu'elle ne maigrit plus aussi rapidement qu'au début et la viande rouge, les féculents et le yogourt sont bannis à leur tour. Peu à peu, l'obsession de la minceur entraîne Manon dans une étrange spirale. Saura-t-elle s'arrêter avant qu'il ne soit trop tard? [SDM]

Rédigé d'une plume sensible et alerte, ce roman sans tabou dresse le portrait touchant d'une adolescente qui glisse lentement vers l'anorexie, dont sont finement décrits les rouages. Sans complaisance ou apitoiement, l'auteure campe en effet une protagoniste criante de vérité qui relate, avec une autodérision salvatrice, son combat quotidien avec la nourriture, soulevant au passage les maux de la société contemporaine. Société pleine de préjugés qui valorise tant et si bien la maigreur extrême que les jeunes hommes se privent de sortir avec une femme en chair par peur des moqueries de leurs copains. Les personnages complexes et nuancés campent également cette impuissance des proches à venir en aide à ces anorexiques dont ils assistent à la déchéance. Si le récit se clôt ici sur une note d'espoir, alors que Manon consulte une psychologue qui l'aide peu à peu à rétablir une relation saine avec la nourriture, l'écrivaine démontre bien que le combat est encore loin d'être gagné et qu'une éducation sociétale reste à faire. Un très bel outil de sensibilisation, donc, à mettre en toutes les mains dès l'âge de treize ans. [SDM]

14 ans +.

J 5.