Derrière le mur / illustration, Isabelle Carrier ; texte, Elsa Valentin.

Un jeune garçon souffre cruellement de l'absence de son père. Cela fait un moment qu'il ne lui a pas préparé de lasagnes, des semaines qu'il n'est pas venu le chercher à l'école, longtemps qu'il n'a pas râlé parce que tout traînait dans la maison, un bail qu'il ne lui a pas gratouillé le dos avant qu'il ne s'endorme et une éternité qu'ils n'ont pas piqué un fou rire ensemble. Selon sa maman, sa petite soeur aura trois ans quand leur papa sortira de prison. Et même si certains osent affirmer que ce n'est pas une lourde peine, cette dernière l'est énormément pour lui. [SDM]

Un album magnifique qui aborde une problématique délicate avec une justesse, une pudeur, une sensibilité et une empathie bouleversantes. La raison de l'absence du père n'est évoquée qu'à la fin de l'album et ce, sans que le mot "prison" ou la raison de son incarcération ne soit mentionnés autrement que par un haut mur garni de barbelés laissant entrevoir la fenêtre munie de barreaux appartenant à un bâtiment où le bambin et sa mère viennent d'effectuer une visite. Toute la place est laissée aux souvenirs des moments heureux que l'enfant a partagés avec son père à une époque qui lui semble bien lointaine. Ces réminiscences, mises en images par des dessins en couleur, alternent judicieusement avec les tranches de vie du quotidien présent, qui sont quant à elles essentiellement esquissées à la mine pour bien marquer le poids du temps qui passe, de la solitude et de l'absence dont souffrent tous les membres de la famille, dont la maman qui "a l'air fatiguée" (p. [9]). Un outil d'intervention extraordinaire dans lequel les courtes phrases aux mots judicieusement choisis s'allient à des illustrations d'une indéniable finesse afin d'aider les enfants à traverser une épreuve difficile tout en invitant à la compassion les adultes intransigeants qui ne doivent pas oublier que les têtes blondes n'ont rien fait pour justifier la souffrance qui est la leur. [SDM]

E+ 5.