Le cimetière des mots doux / [texte de] Agnès Ledig ; [illustrations de] Frédéric Pillot.

Annabelle et Simon sont nés le même mois de la même année, ont grandi dans la même rue du même village et sont dans la même classe de la même école. Les deux jeunes amoureux partagent tout et se comprennent sans même prononcer une seule parole alors qu'ils explorent la forêt en quête de trésors cachés avant de s'y allonger dans la mousse pour écouter le feuillage bruisser sous la caresse du vent. Mais, un jour, le pupitre de Simon reste vide et la maîtresse, toute pâle, cherche ses mots pour leur apprendre que le jeune garçon est atteint de leucémie et qu'il ne reviendra pas. Profondément attristée, Annabelle écoute les adultes discuter de son amoureux et comprend la gravité de son état, même s'il tente pour sa part d'embellir la vérité dans les lettres envoyées de l'hôpital, où il est question de belles rencontres, de jeux et de clowns. Aux prises avec une solitude que personne ne soupçonne, la fillette écrit des billets réconfortants à son amoureux, qu'elle ne revoit qu'une seule petite fois avant son décès, lorsqu'il quitte brièvement l'hôpital: "Il était fatigué, mais il avait décidé d'être heureux. Ça se voyait dans ses yeux." Lorsque l'annonce de sa mort survient, l'héroïne insiste pour assister à l'enterrement de son ami, bien décidée à "lui lancer des mots doux jusqu'au bout du bout." Depuis, des mois ont passé, mais son absence se fait toujours sentir. Alors, pour apaiser son chagrin, elle écrit des billets qu'elle enterre au pied du chêne où ils ont partagé tant de choses en se remémorant son courage et sa joie de vivre. Ceci en compagnie de Thomas, le frère aîné de Simon, qui l'assure le vide immense qu'elle ressent fera un jour place à une douce mélancolie... [SDM]

Un album splendide, qui évoque avec une infinie délicatesse la maladie et la mort d'un enfant, ainsi que le vide qu'il laisse dans la vie de sa jeune amoureuse: "Il me manquait et personne ne savait à quel point". Cette courte phrase, prononcée à de multiples reprises par la jeune narratrice, rythme avec une douceur poignante le texte, qui respire l'amour et les petits bonheurs de l'enfance, tels que revécus à travers les souvenirs d'Annabelle. Aucun pathos dans ce récit illuminé par le courage du jeune malade que l'on devine entre les lignes et, surtout, un amour d'une pureté cristalline qui subsiste au-delà de la mort dans le cimetière des mots doux que la fillette érige au pied du vieux chêne de son ami afin d'extérioriser son chagrin. Une double page prodiguant des conseils aux parents afin d'accompagner leurs petits dans la perte d'un être cher conclut cet album porté par une plume juste, poétique et sensible, dont la beauté est sublimée par les peintures du père de ##Lulu Vroumette##. Alliant un trait réaliste et délicat à une palette de tonalités automnales chatoyantes, ce dernier auréole le texte d'un écrin de douceur en créant des tableaux d'une grande richesse en faisant voyager le lecteur d'une chambre d'enfant ou d'une salle de classe chaleureuses à des décors forestiers auxquels des fleurs, des jeux de lumière et une petite touche impressionniste confèrent une ambiance légèrement féerique. Somptueux! [SDM]

E+ 5.